Le jour, accumuler la chaleur gratuite distribuée par le soleil. La nuit, la libérer dans tout le logement afin d’économiser l’énergie. Ce principe est la clé de Stock-R, l’accumulateur de chaleur solaire conçu par Systovi, une PME de la région nantaise. Cette société, fondée en 2008 par deux anciens ingénieurs de Vaillant (un industriel spécialisé dans le chauffage), s’était déjà distinguée avec R-Volt, son panneau solaire hybride, photovoltaïque et aérothermique. «Nous avons entrepris de valoriser l’énergie solaire non transformée en électricité, soit environ 700 watts sur 1000 watts/m2 d’énergie incidente, explique Mohamed Benabdelkarim, cofondateur et directeur technique de Systovi. L’air chaud est récupéré sous le panneau, puis redistribué dans l’habitat. Mais R-Volt ne fonctionne a fortiori que la journée et les résidents, absents le plus souvent, n’en profitent pas.»
D’où l’idée de relier ces panneaux à une batterie qui puisse emmagasiner une partie de ces calories et les relâcher une fois le soleil couché, au moment le plus utile. Une première version de cette batterie, équipée d’une échangeur air/eau, est finalisée en 2012. Trop complexe, elle n’a pas le succès escompté. Une deuxième version est aussitôt mise en chantier, avec pour objectif de remplacer l’eau. Les ingénieurs de Systovi se tournent vers les matériaux à changement de phase, capables de stocker une grande quantité de chaleur latente de fusion. «Nous avons opté pour le carbonate de calcium hydraté et avons ajouté notre poudre de perlimpinpin, qui abaisse le point de fusion, s’amuse Mohamed Benabdelkarim. La chaleur latente s’élève à 220 joules/kg à 30°C. Une quantité d’eau 50 fois supérieure aurait été nécessaire pour parvenir au même résultat.»
Des plaques en aluminium étanches à vie
Le changement d’état de ce sel permet d’obtenir le déphasage recherché. «Le jour, le carbonate de calcium fond sous l’effet de l’air chauffé à 35°C, en provenance des panneaux solaires, et absorbe la chaleur, précise Mohamed Benabdelkarim. La nuit, l’air à 20°C aspiré à l’intérieur de la maison solidifie le sel, qui restitue son énergie. L’air à la sortie atteint une température de 26 à 27°C.» Aucun apport électrique ou mécanique n’est nécessaire à cette transformation. D’autre part, le sel n’est jamais au contact de l’air et ne dégrade donc pas. «Il est emprisonné dans des plaques en aluminium serties et étanches à vie, ajoute Mohamed Benabdelkarim. L’anodisation de l’aluminium empêche son oxydation. BASF et DuPont ont déjà mené des travaux sur le sujet mais se servaient de plâtre pour enfermer le sel. Faute de débit d’air suffisant, ces recherches n’ont pas porté leurs fruits.» Stock-R requiert en effet une ventilation assez puissante pour compenser la mauvaise conduction thermique de ces matériaux à changement de phase. «Pendant la charge de la batterie, l’air circule à 300 m3/h, indique Mohamed Benabdelkarim. La nuit, lors de la décharge, le débit diminue à 200 m3/h pour atténuer le bruit produit par l’insufflation d’air.»
Stock-R pèse 26 kg et bénéficie d’une capacité de 2,4 kWh, qui lui offre une autonomie d’environ 5 heures. Commercialisé depuis le 1er octobre, ce dispositif coûte environ 2000 € à l’unité, sans compter les panneaux solaires et les accessoires. L’installation se justifie davantage dans les habitations récentes, même bien isolées. «La nuit, la chaleur se déperd très vite au travers des grandes surfaces vitrées notamment, constate Mohamed Benabdelkarim. Le besoin de déphasage est plus important. Au contraire, dans les maisons les plus anciennes construites en pierre, ce sont les murs épais qui jouent ce rôle de batterie à la nuit tombée.» Selon les premiers résultats analysés par Systovi, Stock-R exploite 30% d’énergie solaire supplémentaire, si on se réfère à une installation basée uniquement sur des panneaux R-Volt.